Le cri de Maher Arar ébranle Ottawa Une enquête publique s'impose, conclut le comité des Affaires étrangères Hélène Buzzetti Ottawa -- Les cauchemars ne surgissent pas que pendant le sommeil. Maher Arar, ce Canadien d'origine syrienne expulsé par les États-Unis vers la Syrie, en a vécu un, horrible, pendant une année, cauchemar qu'il a accepté pour la première fois hier de partager avec le public. Les députés fédéraux ont-ils été touchés par le récit? Chose certaine, les députés, à majorité libéraux, siégeant au comité des Affaires étrangères ont défié le mot d'ordre du ministre Bill Graham en demandant à leur gouvernement de tenir une enquête publique indépendante sur toute cette affaire. «J'utilisais mes Air miles pour voyager. C'est pour cela que le meilleur vol que j'ai pu trouver passait par Zurich, New York, puis Montréal», a raconté Maher Arar en conférence de presse hier. «Je suis arrivé à New York le 26 septembre 2002 à 14h. J'avais deux heures d'attente avant ma correspondance pour Montréal. C'est là que mon cauchemar a commencé.» À plusieurs reprises, M. Arar a dû interrompre son récit pour reprendre le contrôle. Son épouse, Monia Mazigh, était à ses côtés pour lui prendre la main dans les moments les plus pénibles. Il est difficile de rester insensible au récit horrifiant de M. Arar. D'abord, il a confirmé qu'il avait été torturé sans relâche pendant 10 jours par les autorités syriennes. On lui a infligé des coups de câbles dégainés sur les paumes (et parfois les poignets), les hanches et le bas du dos, et on l'a placé dans un pneu d'automobile. Il a perdu 40 livres. «Quand ils me battaient avec les câbles, ma peau devenait bleue et le restait deux ou trois semaines, mais je ne saignais pas.» La plus longue séance de sévices aurait duré environ 18 heures. Mais le pire, raconte l'homme, était les moments de répit accordés entre deux séances de torture. On le laissait alors dans une pièce d'où il pouvait entendre les cris des autres personnes en train d'être torturées à leur tour. «C'était la pire partie de mon emprisonnement, d'entendre tous ces gens crier. Je me souviens que mon coeur voulait me sortir de la poitrine.»
M. Arar dit avoir été enfermé dans un caveau sans lumière d'à peine trois pieds de large par six pieds de long et sept pieds de haut. Seule une petite grille au plafond lui procurait un éclairage indirect. Mais cet «extra» comportait un inconvénient : des rats et des chats se promenaient sur la grille et urinaient parfois dans la cellule de M. Arar. «Il y avait deux couvertures, deux assiettes et deux bouteilles : une pour l'eau et une pour uriner la nuit. Je suis resté 10 mois et 10 jours dans ce tombeau.» Craignant toujours la torture, il dit avoir signé plusieurs fausses confessions dans lesquelles il reconnaît s'être rendu en Afghanistan. Il dit aujourd'hui qu'il n'est jamais allé dans ce pays et qu'il n'en a même jamais eu le désir. «On m'a demandé d'écrire ce qu'on me dictait. Si je protestais, on me battait et on me menaçait avec le pneu. J'ai été forcé d'écrire que je suis allé dans un camp d'entraînement en Afghanistan. On me l'a fait signer et on a apposé mes empreintes digitales sur la dernière page. [...] J'aurais dit n'importe quoi pour éviter la torture.» Aujourd'hui âgé de 33 ans, M. Arar a quitté la Syrie à l'âge de 17 ans. Il revenait d'un voyage en Tunisie en septembre 2002 lorsqu'il a été intercepté à New York, interrogé puis expulsé vers la Syrie où il a été incarcéré pendant un an. Les autorités américaines refusent encore et toujours d'expliquer pourquoi ils ont expulsé une personne voyageant avec un passeport canadien vers la Syrie. Rôle des États-Unis et du Canada Maher Arar n'a pas tracé un joli portrait du rôle qu'ont joué les autorités américaines dans toute cette étrange histoire. Ce n'est que sept jours après son arrestation à l'aéroport qu'on lui a permis de téléphoner à sa belle-mère. Le premier jour, il a été interrogé jusqu'à minuit. Maher Arar a demandé un avocat, mais on le lui a refusé «parce que je n'étais pas un citoyen américain», raconte-t-il. «Ils m'ont dit que j'étais d'intérêt spécial.» Il a été enchaîné. Le lendemain matin, les questions ont repris de plus belle pendant huit heures, sur Ben Laden, la Palestine, l'Irak, la mosquée où il priait à Ottawa, etc. On lui a demandé d'accepter volontairement d'être expulsé vers la Syrie, ce qu'il a refusé. Ce n'est qu'à 18h ce soir-là qu'on lui a servi à manger pour la première fois : du McDonald's. On l'a fouillé, on l'a habillé d'un costume orange de prisonnier et on l'a vacciné. «Ils ne voulaient pas me dire ce que c'était.» Puis, il a été placé dans une cellule. Le récit de M. Arar confirme aussi que les autorités canadiennes avaient communiqué des informations à leurs vis-à-vis américains, car de l'information «tellement personnelle» s'est retrouvée en leur possession. Les Américains avaient en effet une copie de son bail datant de 1997, lorsqu'il avait déménagé de Montréal à Ottawa ! «C'était de l'information si personnelle que je pensais qu'elle ne pouvait venir que des autorités canadiennes.» Ce bail intéressait les Américains car le témoin qui l'avait signé était un certain Abdullah Almalki, un autre Canadien d'origine syrienne emprisonné en Syrie depuis quatre mois à l'époque. M. Almalki est toujours en Syrie à l'heure actuelle et aurait subi les mêmes traitements que M. Arar. Ce dernier a confirmé l'avoir croisé en prison. M. Arar connaissait le frère d'Abdullah, Nazih, qui était son partenaire d'affaires dans deux entreprises à Ottawa et à Hull. Les enquêtes sur Arar et Almalki semblent être liées. En janvier 2002, la famille Arar avait reçu à Ottawa la visite de deux agents de la GRC affectés à la sécurité nationale. Les mêmes agents se seraient aussi rendus chez M. Almalki à la même époque. «Ils ont confisqué son ordinateur, des papiers et même toutes ses photos personnelles. On n'a presque plus de photos de lui», explique son frère Yussef, contacté hier par Le Devoir. Selon Yussef Almalki, les autorités canadiennes reprochaient à son frère «d'avoir vendu des ordinateurs à une compagnie, qui les aurait vendus à une autre compagnie, qui les aurait vendus à une autre compagnie, qui les aurait vendus à un groupe terroriste». Selon lui, son frère n'est jamais allé en Afghanistan. Adbullah Almalki a été arrêté dans un aéroport syrien en mai 2002 alors qu'il rendait visite à ses parents. Il aurait été interrogé à propos de Maher Arar à ce moment, a appris M. Arar lorsqu'il l'a croisé en prison. Maher Arar a été expulsé vers la Syrie cinq mois plus tard. Aucune accusation n'a encore été portée contre Almalki. Détenteur lui aussi de la double nationalité, il n'a pas droit aux visites de l'agent consulaire canadien, les Syriens le considérant uniquement comme un Syrien. Enquête publique et indépendante M. Arar a répété à plusieurs reprises hier qu'il souhaitait la tenue d'une enquête publique et indépendante pour blanchir son nom et faire toute la lumière dans ce qui s'est produit. Le ministre des Affaires étrangères, Bill Graham, n'en voit pas l'utilité puisque ce n'est pas une panacée. «Si vous pensez qu'avec ce processus vous pourrez entrer dans la tête des autorités américaines et apprendre qui a pris quelle décision et sur quelle base..., a-t-il dit aux députés siégeant au comité des Affaires étrangères. Je dirais que ce n'est pas important quel processus vous choisissez : même la Cour suprême du Canada ne pourrait pas émettre des assignations qui forceraient un pays étranger à envoyer ses bureaucrates devant nous pour nous dire quelles décisions ils ont prises. Ils sont un pays souverain.» La Commission des plaintes du
public contre la GRC a entrepris une enquête, et M. Graham
a demandé qu'on laisse ce processus suivre son cours avant
d'en entreprendre un autre. Cest aussi lavis du premier
ministre Jean Chrétien, qui a rejeté la requête
de M. Arar. Le ministre Graham a parlé
avec l'ambassadeur syrien en poste à Ottawa hier en fin
de journée. Il lui aurait demandé de «procéder
immédiatement à l'examen des renseignements concernant
la détention de M. Arar ainsi que des autres Canadiens
emprisonnés en Syrie». |
d'une campagne de dénigrement Source: http://src.ca/nouvelles/Index/nouvelles/200310/24/013-arar-fuites.shtml Maher Arar, ce Canadien déporté en Syrie par les autorités américaines, l'automne dernier, se dit victime d'une campagne de dénigrement qui vise à salir sa réputation. Kerry Pither, une porte-parole de la famille, a déclaré que Maher Arar, qui vit reclus à Ottawa depuis son retour, il y a un mois, est la victime d'une campagne visant à détruire sa crédibilité. Elle a également rappporté que M. Arar, affaibli physiquement et psychologiquement, a décidé de ne pas s'exprimer publiquement tant que son état ne s'améliore pas. Le réseau CTV a rapporté jeudi les propos de hauts responsables canadiens qui ont déclaré sous couvert de l'anonymat que M. Arar aurait livré des informations à la Syrie sur des cellules dormantes d'Al-Qaïda au Canada en échange de sa libération. Ces informations viseraient quatre Canadiens membres présumés du réseau terroriste. Trois seraient emprisonnés en Syrie et en Égypte, le quatrième serait actuellement détenu à Ottawa en vertu d'un certificat de sécurité. La Gendarmerie royale du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité et le Solliciteur général, Wayne Easter, ont refusé commenter. Ces fuites surviennent le jour même du dépôt d'une plainte formelle contre la GRC par la Commission des plaintes du public contre la GRC. Cette Commission veut obtenir des éclaircissements concernant le rôle exact de la GRC dans cette affaire. Kerry Pither a déclaré que Maher Arar ne croyait pas que cette Commission puisse lui rendre justice. «Il veut une enquête publique complète où les gens qui seront appelés à témoigner le feront sous serment, plutôt qu'à travers des fuites dans les médias.» Rappelons que Maher Arar se dirigeait vers Montréal, en provenance de Tunisie, lorsqu'il a été intercepté pendant une escale à l'aéroport Kennedy, à New York, à lautomne 2002. Les autorités américaines l'ont aussitôt expulsé en Syrie, son pays d'origine, où il a été emprisonné pendant une année. Au cours de sa détention, il aurait été torturé. |
Source: http://www.web.net/~ccr/maherararfr.html Montréal, le 18 octobre 2002 Le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR) et la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) ont aujourd'hui encouragé M. Bill Graham, Ministre des Affaires étrangères, dans ses démarches contestant vigoureusement le traitement imposé par le gouvernement américain au citoyen canadien déporté récemment vers la Syrie par les Etats-Unis, M. Maher Arar. Le Canada se prépare actuellement à signer un accord de « tiers pays sûr » avec les États-Unis, selon lequel les États-Unis seraient déclarés un « pays sûr » pour les réfugiés. « Si les citoyens canadiens ne sont pas en sécurité aux É.U. » se demande Kemi Jacobs, Présidente du CCR, « comment peut-on prétendre que les réfugiés sont en sécurité aux États-Unis? Si les États-Unis traitent un citoyen canadien de cette manière, alors qu'il bénéficie de la protection du Canada, le plus grand partenaire commercial des É-U, il n'est pas difficile d'imaginer comment ils traitent les demandeurs du statut de réfugié, qui n'ont aucun gouvernement pour les défendre.» Le CCR et la TCRI notent que le traitement réservé à M. Arar, découlait du fait qu'il est venu au Canada en tant qu'immigrant, plutôt que d'être né au Canada. Les États-Unis envoient le message qu'ils n'ont pas l'intention de considérer comme citoyens à part entière ceux qui viennent chez nous comme des immigrants ou des réfugiés. « Nous comptons sur le gouvernement canadien pour affirmer très clairement aux États-Unis que tous les citoyens canadiens sont égaux et doivent être traités de façon égale » a remarqué Kemi Jacobs. Le traitement discriminatoire
réservé par le gouvernement américain aux
personnes musulmanes et aux ressortissants des pays islamiques
devient de plus en plus clair. « Nous sommes profondément
préoccupés que le Canada compte renvoyer aux États-Unis
des demandeurs du statut de réfugié, y compris
des personnes musulmanes, sachant que les États-Unis ont
annoncé qu'ils traiteraient dorénavant de manière
distincte et discriminatoire les ressortissants de certains pays
» a dit Kemi Jacobs. Janet Dench, Directrice CCR 514-277-7223
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Source: http://www.cpc-cpp.gc.ca/DefaultSite/NewsRoom/ COMMUNIQUÉ DE PRESSE En déposant la plainte, Mme Heafey a lancé une procédure énoncée dans la Loi sur la GRC qui exige que la GRC rende compte à la Commission, une autorité civile indépendante chargée de l'examen de la conduite de ses membres. La plainte contient une série d'allégations qui sont nécessaires au dépôt de la plainte conformément à la Loi sur la GRC. La plainte est déposée dans le but d'établir le bien-fondé de ces allégations. Si la Présidente n'est pas satisfaite de la réponse de la GRC au sujet de ces allégations, elle pourra tenir sa propre enquête. Mme Heafey a déclaré : « En raison des implications en matière de sécurité nationale, nous ne pourrons divulguer publiquement tous les renseignements auxquels la Commission aura accès. Cependant, nous devons assurer les Canadiens et les Canadiennes que la GRC est redevable au public tel que le prescrit la loi. » La plainte exige de la GRC qu'elle indique si certains membres ont encouragé les autorités américaines de façon irrégulière à expulser un citoyen canadien, M. Maher Arar, des États-Unis vers la Syrie. La plainte exige également de la GRC qu'elle rende compte des allégations selon lesquelles des membres de la GRC n'ont pas dissuadé les autorités américaines d'expulser un citoyen canadien, M. Maher Arar, des États-Unis vers la Syrie. La GRC doit de plus indiquer si certains membres ont divulgué d'une manière inappropriée de l'information et/ou s'ils ont transmis des renseignements erronés ou incomplets au sujet de M. Maher Arar aux autorités américaines et/ou syriennes. Enfin, la GRC doit rendre compte des allégations selon lesquelles des membres de la GRC ont entravé les efforts du gouvernement canadien et d'autres concernant l'obtention de la libération de M. Maher Arar. La Commission est un organisme civil indépendant qui examinera le rapport de la GRC sur ces allégations. La Commission tient à rendre ses conclusions accessibles au public, bien que l'information qu'elle recevra de la GRC ne sera pas entièrement divulguée publiquement. La Présidente de la Commission a déposé cette plainte en vertu de l'autorité énoncée au paragraphe 45.37(1) de la Loi sur la GRC. Cette plainte sera envoyée à la GRC tel que l'exige le paragraphe 45.35(3) de la Loi. Pour de plus amples renseignements sur les procédures de la Commission, veuillez vous reporter au document d'information ci-joint. |